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COLLECTIF EUROPEEN
D'EQUIPES DE PEDAGOGIE INSTITUTIONNELLE
auteur : épirénées
date : mars 2011

Manque de communication,

(texte élu et discuté à la réunion de mars de l'épirénées)

Notre journée de classe, nous la passons avec nos élèves. Les questions, les réponses, les explications, les informations s'échangent dans le groupe, bref, nous communiquons. Et puis, à chaque début et fin de demi-journée, c'est avec les parents d'élèves que nous sommes en contact. En maternelle particulièrement, ces moments permettent l'échange d'informations directement entre l'école et les familles, facilitant ainsi la communication : « il a toussé toute la nuit », « vous penserez à rapporter ses draps ? », « je peux vous accompagner pour la sortie », « comment ça s'est passé aujourd'hui ? »…

Généralement, on parle de « petites choses » sans grandes conséquences mais qui renforcent le lien école-maison. Pour les sujets plus complexes qui nécessitent plus de temps et de discrétion, on prend rendez-vous, par exemple pour Lucas qui parle de manière incompréhensible, Evan qui a un problème de vue, Rémi qui prononce mal de nombreux sons, Yannis qui pleure en arrivant le matin.

Grâce à cette organisation, la communication semble donc possible entre les parents et moi. C'est du moins ce que je croyais.

Afin de préparer le prochain conseil d'école, les parents d'élèves se sont réunis pour recueillir les questions qu'ils souhaitent aborder. Leur liste établie a été transmise à la directrice qui, bien sûr, en a fait part à l'équipe enseignante.

Sont apparues des questions concernant des choix pédagogiques, l'organisation de la sieste et du décloisonnement ou des contenus d'enseignement. Autrement dit, des sujets que le conseil d'école n'a pas à traiter puisque relevant de la seule responsabilité des enseignants.

Ce n'est pas le fait que les parents se posent des questions sur le fonctionnement de la classe de leur enfant qui m'étonne. Au contraire, c'est une bonne chose. Ce qui me surprend c'est que ces questions apparaissent dans le cadre du conseil d'école sans avoir été évoquées en face à face avec l'enseignante concernée.
Pourquoi utiliser le cadre complexe et formel du conseil d'école plutôt que de demander quelques minutes à la maîtresse pour lui poser une simple question ?
Je pensais me montrer assez disponible et à l'écoute des familles pour permettre la communication. Apparemment cela ne suffit pas.
 

Catherine, Réunion du 15 mars 2011

Questionnement du texte :

Q : Où ces échanges ont-ils lieu ?
R : Dans le couloir du préfabriqué. Je vois les parents, j'appelle les enfants. Le matin, c'est plus échelonné.

Q : Y a-t-il des questions qui t'ont gênée plus que d'autres ?
R : Il y a des sous-entendus dans certaines questions. Par exemple, le décloisonnement pendant la sieste : jeux mathématiques avec les moyens qui ne dorment pas : « Pourquoi dans la classe de Mme D. les enfants jouent l'après-midi ? »

Q : Tu as l'occasion de voir tous les parents ?
R : Aucun élève dont je n'ai jamais vu un des deux parents. Au moins un des deux une fois de temps en temps.

Q : Le conseil d'école est déjà passé ?
R : pas encore.

Q : ?
R : On a souvent l'impression que certains parents veulent régler des questions perso au conseil d'école.

Q : Avez-vous fait des réunions de rentrée ?
R : Oui. Mais certains fonctionnements évoluent en cours d'année. On ne les a pas forcément expliqués à tout le monde.

Q : Vous savez de qui viennent les questions ?
R : Officiellement non. On a des soupçons…

Q : Qu'est-ce qui vous fait dire que c'est agressif ? Juste les questions ?
R : Ils nous demandent de nous justifier. Question du goûter : les parents ont fait un sondage…

Q : Le cadre du conseil d'école (l'absence de cadre) t'inquiète aussi ?
R : C'est plus une discussion à bâtons rompus ! On ne sait jamais trop comment ça peut tourner…

Q : Avez-vous d'autres modes de communication ?
R : Il y a un cahier de liaison, un panneau d'affichage, mais qu'il ne faut pas surcharger (à la demande des parents) !

Q : Les parents en question étaient là aux réunions de rentrée ?
R : Je crois que oui…

Q : Y a-t-il des circulaires officielles concernant les goûters?
R : On n'a pas trouvé de textes officiels et nous n'avons pas de réponse de l'inspectrice.

Q : Comment est venue cette décision ?
R : La demande de supprimer les goûters est venue des enseignants mais pas des textes officiels (l'inspectrice nous a finalement répondu en nous envoyant le texte de cadrage de l'IA qui recommande effectivement d'éviter les goûters à l'école)

Q : Ne manque-t-il pas de cadre formel ?
R : Exemple d'une maman questionnant le décloisonnement et la sieste. La réponse de Catherine ne satisfait pas la mère et celle-ci décide d'y revenir au Conseil d'Ecole.

Q : Je repose la question, Ne manque-t-il pas de cadre formel ?
R : peut-être que les parents n'ont pas trouvé d'autre moyen ? Peut-être faudrait-il une réunion en milieu d'année ?

Q : Tu sembles déplorer le côté formel. Que penserais-tu si un élève venait te voir au lieu d'en parler au conseil ?
R : Si c'était pour un sujet personnel, ça serait normal.

Q : Les questions ne concernent-elles que ta classe ?
R : Elles concernent les deux classes concernées par le décloisonnement.

Q : D'où peut venir cette montée de l'agressivité des parents ?
R : On n'a pas répondu aux questions. Problème des parents qui ne peuvent pas accompagner leur enfant jusqu'à la classe aux arrivées ou sorties. Ils cherchent un autre moyen pour attaquer.

Q : Difficulté du face à face. En général on évite. Est-ce que ça se passe bien ?
R : Pas de confrontations sauf le cas d'une mère qui s'était proposée pour accompagner pour une sortie, que je n'ai pas prise par manque d'affinités. La mère a alors déclaré être contre le projet de sortie.

Rebond au texte :

Questions qui traitent du lieu, d'un endroit où les choses peuvent se dire.

L'intérêt du cadre réside dans la possibilité d'échanges protégés. Le conseil d'école n'offre pas toujours la possibilité aux parents d'exprimer ce qu'ils ressentent de l'école, de cette « angoisse » dont parle Jean Oury dans « Onze heures du soir à La Borde ». Il s'agit parfois d'une « confrontation » entre deux blocs : enseignants vs parents, campés sur leurs positions préméditées.

Faut-il chercher d'autres entrées, impliquer les parents dans des projets, responsabiliser, c'est-à-dire donner le moyen d'intervenir autrement que par le discours direct : ex : on part en classe découverte : les accompagnants seront responsables : qui de l'infirmerie, qui des « photos », qui des messages à envoyer via internet aux familles. Mais pas seulement distribuer des responsabilités : en parler, se réunir pour décider, pour construire le cadre…

Autre exemple : les parents présentent en classe : leur métier, un objet qu'ils utilisent, une photo : cela demande de se voir, de se mettre au point.

Du coup, les relations peuvent changer. Il ne s'agit plus seulement de « décharger » d'un côté ou de l'autre des peurs réciproques.
F. Oury écrivait : "avec les parents, tout est possible. Sans les parents, on peut également agir. Contre les parents, on ne peut rien faire".
D'autant plus qu'aujourd'hui, la méfiance est de mise et qu'on ne fait plus confiance aux enseignants d'emblée…
 




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