options de recherche
COLLECTIF EUROPEEN
D'EQUIPES DE PEDAGOGIE INSTITUTIONNELLE
date : 27 mars 2010

Pauline Kergomard (1838-1925)

- dernière née d'une famille de 7 enfants, Jeanne, Marie Pauline Reclus, qui deviendra Pauline KERGOMARD en 1863, a été élevée sévèrement par un père inspecteur de l'enseignement primaire, puis par un oncle pasteur et enfin dans une institution privée laïque, le Cours Normal d'Institutrices de la Gironde
- elle passe son brevet de capacité en 1856 et vit difficilement des articles qu'elle écrit dans des revues féministes ou pédagogiques et des cours qu'elle fondait
- quand elle se marie elle s'installe à Paris et se fait de nombreuses relations parmi les amis républicains de son mari (ami de Garibaldi et ancien exilé après le coup d'état de Louis-Napoléon Bonaparte)
- elle peut ouvrir un "Cours kergomard" en 1879 et est nommée la même année "déléguée à l'Inspection Générale des Salles d'Asiles"
- l'œuvre de Pauline KERGOMARD commence à cette époque, elle a 41 ans
- en effet elle s'est attachée à réformer entièrement les méthodes alors appliquées dans les salles d'asile où les enfants de 2 à 5 ans étaient accablés par un enseignement et une discipline absurdes. Elle écrit en 1880 : "Lorsqu'on a vu que le dressage physique ne suffisait pas, on a acheté des tableaux de lecture, on a essayé d'apprendre à lire à des enfants qui ne savaient pas parler, on a chargé leur mémoire de catéchisme et d'histoire sainte (...)"
- les salles d'asile qu'elle visite dans la France entière au début de sa carrière d'inspectrice étaient souvent des locaux insalubres, véritables taudis où les enfants manquaient de lumière et d'air
- l'organisation matérielle de ces salles disait clairement la pédagogie qui s'y trouvait pratiquée : une salle d'asile c'est une très grande pièce avec quelques dépendances (privés et lavabos) où des centaines d'enfants sont réunis (souvent 300 ou 400 enfants)
- des gradins et de chaque côté en ligne droite pour que la surveillance puisse s'exercer des rangées de bancs fixés au sol
- les fenêtres étaient réglementairement situées à 2 mètres du sol pour que les enfants ne puissent pas regarder à l'extérieur
- le matériel éducatif est réduit au minimum : le boulier-compteur, des tableaux de lecture et des scènes de l'histoire sainte. Aucun matériel n'est à la disposition des enfants et quand on dispose de suffisamment d'ardoises ils doivent les tenir sur leurs genoux
- les surveillantes, peu nombreuses, une ou deux par salle utilise le sifflet pour mettre fin aux exercices ou obtenir le silence et l'immobilité et le claquoir qui scandait tous les déplacements des enfants
- qualifiées officiellement en 1837 d'établissements charitables les salles d'asiles furent crées pour garder les jeunes enfants des familles ouvrières pendant que leurs mères travaillaient.
- le développement du capita­lisme industriel au XIXe siècle avait conduit à la recherche de la main-d'œuvre la moins chère possible et on sait que cette époque avait vu la mise au travail d'un grand nombre de femmes et d'enfants en dehors de la maison familiale
- donc il avait fallu ouvrir des lieux d'accueil surtout dans les villes et les régions industrialisées pour les jeunes enfants qui ne pouvaient être normalement gardés par leur mère
- l'enfant à la salle d'asile c'était en même temps la mère à la manufacture
- certains Ministères de l'Instruction Publique, sous Louis-Philippe ou Napoléon III, avaient déclaré vouloir inscrire les salles d'asile au nombre des établissements d'éducation
- en réalité il s'agissait de former dès le plus jeune âge des citoyens "polis" et "honnêtes", des travailleurs et des soldats dociles : de nombreux textes témoignent sans s'en cacher de cette volonté calculée d'enrégimenter les jeunes enfants.
- toutes les activités avaient des allures d'exercice militaire
- dans le célèbre "Manuel des salles d'asile" de Denys COCHIN (1ère édition 1833) il était précisé avec une minutie extrême le déroulement des exercices et des évolutions dans la salle d'asile : "Enfants du banc des ardoises! Garçons, demi-tour par le flanc droit! Filles, demi-tour par le flanc gauche! Préparez la pied gauche! Montez sur le banc! etc."
- pour Pauline KERGOMARD c'est l'organisation de l'ankylose physique et intellectuelle
- quand elle décrit le dressage mécanique dont les enfants étaient victimes aux environs de 1880 on est loin du ton enthousiaste qui était celui sous le second empire pour vanter à n'en plus finir les mérites des grands mouvements d'ensemble et où on prétendait observer la joie des enfants soumis par centaines à ce régime militaire
- elle dénonce le souci d'instruire mis en oeuvre dans les salles d'asile, elle n'y voit qu'une néfaste "école d'asile"
- elle s'indigne qu'on bourre le crâne aux petits de définitions stériles. Elle proteste contre l'apprentissage de la lecture c'est pourquoi elle refuse aux salles d'asile le titre d'établissements d'éducation : elles sont des petites casernes ou bien des petites sorbonnes avec des leçons interminables sur des sujets hors de la portée des enfants
- une profonde réforme lui paraissait nécessaire
 
- elle ne fut pas la seule à critiquer les réalités de la salle d'asile mais c'est elle qui formula avec la plus grande pertinence les finalités nécessaires des nouvelles écoles maternelles et à agir avec la plus grande ténacité pour que les pratiques courantes soient radicalement modifiées
- les écoles maternelles remplacent officiellement les salles d'asile en 1881 : elles sont définies comme des "établissements d'éducation où les enfants des deux sexes reçoivent les soins que réclame leur développement physique, intellectuel et moral" elles ne sont plus des institutions charitables mais des écoles à part entière
- les écoles maternelles prennent place à l'intérieur du cadre général de l'enseignement primaire
- alors Pauline KERGOMARD doit mener un autre combat, celui contre l'instruction prématurée, contre l'envahissement de l'école maternelle par l'école primaire
- à ses yeux si l'école maternelle ne doit pas être une simple garderie elle ne doit pas être non plus confondue comme une "école au sens ordinaire du mot", elle doit conquérir sa spécificité
- par exemple l'apprentissage précoce de la lecture et de l'écriture est à rejeter  
- c'est sur son impulsion que les Programmes Officiels sont modifiés et que la vocation de l'école maternelle s'exprime dans le fait qu'elle est définie comme établissement d'éducation et non pas d'instruction
- l'école maternelle française actuelle doit l'essentiel de son originalité éducative à l'action continue de Pauline KERGOMARD
- pour Pauline KERGOMARD, si l'école maternelle s'oppose à la fois à la salle de garderie asile et à l'école primaire, elle doit être une "famille agrandie" où les enseignantes ne se comportent pas comme des professeurs
- l'accent est mis ainsi à la fois sur le matériel (jouets, ustensiles de cuisine) sur les activités éducatives (il s'agit d'enseigner la langue maternelle et non pas la langue des livres) sur la nécessité de connaître les enfants en tant qu'individus particuliers et surtout sur l'attention à accorder aux besoins les plus essentiels et les plus élémentaires
- il faut rappeler qu'à l'époque les enfants qui fréquentent l'école maternelle sont les enfants des classes laborieuses et de condition souvent fort modeste
- importance de l'hygiène et de la propreté (les maladies infectieuses faisaient des ravages, mortalité infantile très importante)
- peu importe dit-elle que l'emploi du temps soit assez largement consacré à ces surveillances matérielles (il faut d'abord subvenir aux besoins essentiels des enfants (nourriture, vêtements, propreté)
- pour Pauline kergomard l'école maternelle est avant tout "un home où l'on apprend à se bien porter physiquement et moralement"
- jusqu'au début du XXème siècle les textes officiels témoigneront de ces préoccupations hygiéniques et contre les abus de l'instruction prématurée, l'école maternelle sera  présentée comme une école d'hygiène et de propreté
- elle écrit que l'école maternelle est comme "un gîte dans la grande et noble acception du mot, un gîte où l'enfant de la classe travailleuse et celui de la classe indigente est à l'abri des éléments, à l'abri des accidents, à l'abri des mauvais exemples, à l'abri de toutes les laideurs;"
- l'école maternelle doit jouer un rôle de protection sociale de l'enfant
- si dans les salles d'asile on souhaitait que les enfants soient "moins mal" dans l'école maternelle il faut que les enfants soient "bien" à l'intérieur de véritables maisons d'éducation qui puissent recevoir les enfants de toutes origines sociales et être le "vrai berceau de la démocratie"
- car il est vrai que l'école maternelle resta longtemps la première école pour enfants pauvres ou d'origine modeste et qu'elle n'a été fréquentée que tardivement par des enfants issus de toutes les classes sociales
- aujourd'hui la situation a bien changé, la quasi totalité des enfants de 4-5 ans est scolarisée (alors que l'âge de la scolarité obligatoire est 6 ans)
- les enfants de toutes les classes sociales sont concernés par l'école maternelle
- Pauline KERGOMARD elle, à son époque, considérait que l'enfant en bas âge avait d'abord besoin de la présence de sa mère et que l'école maternelle n'était qu'un pis-aller
- toutes les réformes dont on ne peut rendre compte que de l'esprit car les détails sont infinis qu'elle tenta de faire appliquer à travers son travail d'inspectrice (nombreuses conférences, innombrables articles pour la presse pédagogique) contribuèrent à faire entrer dans les jardins d'enfants et les écoles maternelles un esprit de liberté et de jeu qui en finit définitivement avec les anciennes méthodes des salles d'asile
- ses conceptions fondamentales, malgré des procédés qui ont parfois vieilli restent pour nous une source très riche de réflexion
- mais les attaques contre Pauline kergomard de la part de l'église (pour avoir par exemple préconisé la mixité) mais en réalité pour ses sympathies à l'égard du socialisme font qu'elles est évincée du Conseil Supérieur de l'Instruction Publique en 1890
- ensuite elle crée une association de protection des enfants maltraités ou abandonnés et tente de fonder une Université Populaire qui sombre pour des raisons politiques quelques années plus tard
- quand la guerre éclate elles organise des cours pour les ouvriers laissés sans emploi à la suite de la fermeture de leurs usines puis elle doit quitter Paris en 1918
- elle vit ensuite à Lyon où elle meurt en 1925

 

Œuvres [modifier]

 

 

  • Galerie enfantine illustres (1879)
  • Les biens de la terre, causeries enfantines (1879)
  • L'amiral Coligny (1881)
  • Nouvelles enfantines (1881)
  • Une brouille de peu de durée. Les Convives de Gabrielle. Fileuse et couseuse (1883)
  • Histoire de France des petits enfants (1883)
  • L'éducation maternelle dans l'école (1886)
  • Cinquante images expliquées [Album pour les enfants.] (1890)
  • Heureuse rencontre (1895)
  • Les Écoles maternelles de 1837 jusqu'en 1910, aperçu rapide (1910)
  • L'enfant de deux à six ans



3 commentaires

le 11 mai 2011, à 18:59
bonjour,
je constate juste une petite incohérence sur vos dates concernant la vie de Pauline KERGOMARD.
En effet, elle ne peut pas, même si elle était une femme très intelligente, obtenir son brevet de capacité en 1838 (année de sa naissance). Elle l'a effectivement obtenu en 1856.
cordialement

emmanuelle

le 12 mai 2011, à 15:29
Merci pour votre attention, je corrige ! Ch Facca, webmestre

chantal

le 30 septembre 2011, à 09:31
elle est morte à Saint Maurice dans le val de marne et non à Lyon.

un anonyme